Tous les tatoueurs et voyageurs sur les routes d'Asie se réjouissaient pour fêter la cinquième édition de la convention internationale de Katmandou, devenue incontournable dans le milieu. Le tremblement de terre de magnitude 7,8 qui a ébranlé le pays le samedi 25 avril à midi a mis fin à l'évènement de façon tragique. Plus de 8 700 personnes ont perdu la vie, un demi-million de maisons ont été détruites, des villages entiers ont disparu et un quart des 31 millions de Népalais a été touché directement. Une situation aggravée par un second séisme le 12 mai et d'innombrables répliques. Quelques artistes ont choisi de rester après la catastrophe, pour participer aux opérations de secours et de s'engager pour rassembler des fonds pour les populations démunies, des actions auxquelles vous pouvez contribuer.
CONVENTION DE KATMANDOU – Ce n'était qu'un au revoir La salle de bal de l'hôtel Yak and Yeti a reçu ses premiers voyageurs en 1953, lorsque la contrée millénaire a ouvert ses temples et ses montagnes au monde. Deux générations plus tard, l'établissement de luxe a accueilli la cinquième convention de tatouage de Katmandou, frappée en plein cœur par le séisme. Les organisateurs sont prêts à se relever.
Vendredi matin, Johann Morel, tatoueur suisse (Steel Workshop) attend ses premiers clients, ses flashs disposés sur la table : « J'ai hâte de les tatouer, car tous les fonds seront reversés à une association d'aide aux femmes et aux enfants, Saathi. Je n'ai pas besoin de cet argent, j'enchaîne avec un guest à Hong Kong et en Suisse j'ai un an de liste d'attente. A 30 euros le motif, j'espère pouvoir leur reverser au moins 500 euros. Je n'ai jamais été aussi bien accueilli dans une convention, l'équipe de Mohan Gurung est incroyable ». Pour la plupart des artistes présents, « le Népal c'est différent ». Beaucoup vivent sur la route et ils ne viennent pas ici pour le business, au vu des moyens de la population locale, mais pour l'expérience. Katmandou est devenu « la » convention cool, où l'on se promène pieds nus et on rencontre la terre entière, le temps d'une pause soleil sur la terrasse.
L'événement est prisé des randonneurs, de la scène trance de Goa, des diplomates de l'ONU pour son ambiance effervescente mais aussi des familles et bandes d'amis népalaises, et plus seulement des gangsters. Le climat anti-punk s'est définitivement dissipé depuis cinq ans. Pendant que des enfants en costume distribuent des pétales de fleurs, que des danseuses traditionnelles offrent une performance sur la scène, un attroupement de curieux se forme autour du stand de Iestyn Flye (Divine Canvas), qui offre au public une scarification sur la poitrine d'un Népalais aux dents serrées.
La journée s'achève avec l'explosion de joie d'Eric Jason D Souza (Iron Buzz Tattoos), gagnant du premier prix pour une pièce apposée sur l'avant-bras de sa copine.
Le jeune couple, venu de Bombay pour la troisième année, est extatique : « C'est formidable d'être reconnu ici car le tatouage en Inde a encore une très mauvaise image. Depuis 2-3 ans, un boom a donné le jour à environ 15 000 shops mais seulement 150 artistes professionnels. Alors nous travaillons sur un projet avec le gouvernement pour professionnaliser cette activité ». La nuit tombe sur la ville aux fanions, les bars jouent des airs de Janis Joplin, les rues résonnent des klaxons des rickshaws.
Samedi matin, Guy le Tatooer, après tant d'années sur la route, prend peu à peu goût aux conventions : « C'est la première année que j'en fais, Bornéo, Londres, Florence, etc. et je cumule avec des projets sociaux en Inde. Au Népal aujourd'hui tous les mecs de la scène musicale veulent se faire tatouer, ils sont très ouverts et ont envie de s'éclater, comme toute société qui a été muselée trop longtemps. Si l'art est bien composé, les Népalais apprécient, c'est un peuple d'artistes ». A ce moment-là, toutes les lumières s'éteignent et deux secondes après, tout se met à valser. Les gens essaient de fuir la terre qui s'échappe sous les pieds, hurlent en courant vers la sortie ou en se plaquant au mur. Tout le monde se retrouve dans la cour, en état de choc. Ajarn Man, un maître tatoueur thaïlandais distribue des amulettes en terre cuite à tous ceux autour de lui en leur souhaitant bonne chance pour la suite.
Entre répliques incessantes, conditions de vie précaires, coupure des communications et tristesse infinie, les jours qui suivent sont douloureux. Une quinzaine d'invités choisissent de rester après la catastrophe pour soutenir l'effort de guerre. A Pashupatinath, complexe religieux où les Hindous brûlent leurs morts depuis la nuit des temps, des artistes tatouent des Népalais à la recherche de protection, accompagnés par la foule en deuil le long de la rivière.
D'autres récoltent des fonds pour acheter des biens de première nécessité et les transporter vers les villages de la vallée de Katmandou ou redistribuent l'argent à des initiatives locales pour la construction de tentes, de toilettes, d'écoles. A New-York, Londres, Southampton, Les Vans, Rottweil, Copenhague, Bangkok, les journées tatouages, piercing, vente de T-shirts, photographies, dessins originaux se multiplient pour financer les actions de reconstruction. Désormais en guest à Bangkok à Six Fathoms Deep, Max Well et Angie sont restés deux semaines après le séisme. « Lors de notre première convention l'an passé, le Népal nous a changé la vie. C'est une alchimie magique, nous avons vraiment trouvé une famille là-bas. Il faut qu'on y retourne, qu'on finisse les pièces que nous avons commencé. En attendant, nous nous concentrons sur la récolte de fonds à distance ». Ils seront les premiers à s'envoler pour le Népal si une sixième édition fait surface l'an prochain. Mohan Gurung et Bijay Shrestha, le duo d'organisateurs, sont déterminés. « Si la situation le permet, nous allons relancer la convention l'an prochain. Après l'incroyable soutien que nous avons reçu de la communauté du tatouage, nous nous devons de continuer cette tradition familiale pour toujours ». Texte : Laure Siegel Photos : P-mod / Tom Vater Comment aider le Népal ?
Si vous connaissez quelqu'un sur place qui a besoin d'aide, envoyez-lui de l'argent directement par Western Union. Sinon, privilégiez un collectif de bénévoles qui agit directement sur le terrain ou participez à une action artistique : > #We Help Nepal : Un réseau sans hiérarchie et sans salaires, fondé par des Népalais et étrangers vivant ou ayant vécu au Népal. Ils se chargent de coordonner les initiatives locales en redistribuant les fonds récoltés via leur plateforme. http://www.wehelpnepal.org/ https://www.facebook.com/WeHelpNepal > Rise for Nepal : Une organisation créée par 200 jeunes volontaires népalais pour reconstruire leurs pays eux-mêmes, sur le terrain. https://www.facebook.com/pages/Rise-For-Nepal/1440722356239673 > Miranda Morton Yap, une écrivaine américaine qui vit à Katmandou et coordonne la levée de fonds pour Helter Shelter et To Da Loo, qui se concentrent sur la construction d'abris et de toilettes. http://mirandatravelsblog.blogspot.com/2015/05/subject-rebuilding-nepal.html
Chez les tatoueurs > Par Steel Workshop (Suisse) : No silence for NEPAL Association https://www.facebook.com/nosilencefornepal/ - http://www.nosilence4nepal.com Soutenir l'association qui reconstruit notamment des maisons dans le district de Gorkha en reversant le bénéfice d'un tatouage - One Tattoo for Nepal : https://www.facebook.com/onetattofornepal Mais aussi en assistant à une des dates de la tournée Metal for Nepal : https://www.facebook.com/metal4nepal > Par Jad's Tattoo (Katmandou) : Ktm-20152504 https://www.facebook.com/Ktm20152504 - http://www.gofundme.com/tdq7q8z4 > Par Funky Buddha Tattoo (Katmandou) : Funky Buddha Hands http://www.facebook.com/FunkyBuddhaHands - http://www.leetchi.com/c/solidarite-de-nepal-3409692 > Par Phil & Joanna Antahkarana (Copenhague) : Tattoo Aid for Nepal, une initiative qui appelle à reverser le prix d'un tattoo dont le design a été composé par les artistes, à Direct Relief, une ONG spécialisée dans l'aide médicale d'urgence. http://theantahkarana.tattoo/news.html http://www.directrelief.org/